L’érable à sucre

Érable à sucre - emblème du Canada
04 Oct 2023

« Le bon jumeau […] fit en sorte que l’érable laisse couler son sirop dès qu’on le percerait. Puis vint le méchant. […] Il versa de l’eau dans l’érable pour éclaircir le sirop jusqu’à le transformer en sève qu’on ne pouvait réduire en sirop qu’au prix d’efforts harassants. […] C’était cependant une chance que [le bon jumeau] puisse toujours réparer une partie des effets néfastes du travail de son frère, car la vie aurait été vraiment intolérable pour les gens » (Grabowski).
Mythe Huron-Wendat.

Acer saccharum

L’érable à sucre, pour nous québécois, fait partie en part entière de notre culture. Il en fait partie depuis bien avant que les européens aient mis les pieds sur le continent américain. En effet, les Amérindiens le concoctaient déjà lorsque les premiers explorateurs les avaient rencontrés, et c’est eux qui ont transmit ce savoir-faire à nos ancêtres. On peut lire ci-haut l’importance symbolique que pouvait avoir l’érable à sucre pour eux.

De nos jours, combien de temps avons-nous passé en cabane à sucre; pour une remise de médaille de hockey ou même pour une réception de mariage? Et le sirop d’érable, exotique pour le reste du monde, fait partie ici de notre quotidien. C’est un arbre qui fait notre fierté et une partie de notre identité, tout simplement. Certains s’imaginent que la culture du sirop d’érable est réservée à des experts. S’ils n’ont pas tout à fait tort, il faut quand même préciser que l’entaille d’érable à sucre peu se faire chez soi. Percez, installez les chalumeaux, attendez la fin du printemps, recueillez, faites chauffer, et vous aurez votre sirop d’érable maison. Il faut 40 litres de sève pour produire un litre de sirop d’érable. Si vous avez quelques spécimens matures sur votre propriété, et que vous avez du temps à consacrer à cette activité, vous pourriez produire quelques litres pour votre propre consommation. Attention ! Il se pourrait que vous ne soyez plus capable ensuite d’apprécier le sirop vendu en épicerie. À vos risques…

Cabane à sucre canadienne - Sirop d'érable traditionnel

Cabane à sucre canadienne – Sirop d’érable traditionnel

Cet arbre, que l’on appelle aussi érable franc, pousse dans le sud du Manitoba, de l’Ontario, du Québec et des Maritimes. On en rencontre aussi dans le Nord-Est des États-Unis. C’est un arbre décoratif majestueux et solide, et, pourtant, sensible à nos conditions urbaines. Hormis ses qualités culinaires, il possède aussi des qualités esthétiques pour le bois d’œuvre, comme pour les planchers de bois franc, les parquets, les contreplaqués et les escaliers. Un peu d’huile ou de teinture sur du bois d’érable et on voit tous les motifs naturels des cernes et du duramen. Il est aussi assez solide pour la confection de manche de marteau ou autres outils, qui profiteront aussi de son allure rustique.

Un arbre fabuleux et solide, mais délicat

Cette espèce en est une à croissance lente, ce qui lui confère sa solidité, mais aussi une certaine sensibilité à la pollution. Avec de la patience, on peut obtenir un arbre d’une hauteur de 25 mètres à maturité, avec une largeur d’environ 15 mètres. Sa forme aura un aspect plutôt ovale en jeunesse, et deviendra arrondie avec le temps. L’allure de la cime cet arbre, à maturité, a une forme très régulière. Les branches, courtes et robustes, forment un dôme en pointant parfaitement chaque angle d’un demi-cercle.

Quand on regarde un érable à sucre, on remarque tout de suite sa rectitude. On dirait presque qu’on pourrait prendre le tronc et l’utiliser comme équerre, tellement il est droit. On reconnaît son écorce à sa couleur brune mélangée à un gris foncé. Sa texture est lisse, mais devient rugueuse avec le temps à cause de ses sillons. L’arbre mature aura un tronc orné d’écorce qui se pèle quelque peu, comme des guirlandes à moitié frisées.

Les feuilles

Notre arbre des douceurs fait aussi partie de notre expérience commune pour ses couleurs automnales époustouflantes. Je me souviens des automnes, étant petit, quand je ramenais des feuilles rouges d’érable à sucre pour les tremper dans la cire chaude afin de les conserver. Je pouvais ensuite les mettre dans un album photo pour les collectionner. Elles sont belles à ce point !

Plutôt larges, les feuilles mesurent de 10 à 20 cm de longueur. Elles sont disposées selon un patron opposé, donc les branches aussi. On reconnaît facilement, grâce au drapeau canadien qui en est orné, sa feuille avec ses 3 grands lobes, avec souvent deux plus petits lobes de chaque côté du pétiole. En été, elles sont vertes. Mais c’est à l’automne que cet arbre laisse sa marque colorée dans nos esprits. Elles deviendront alors jaune orangé, avec des teintes de bronze, ou alors rouge vif.

Acer saccharum - Érable à sucre en automne au Québec

Acer saccharum – Érable à sucre en automne au Québec

Les fruits et la faune

Bon enfant, on se plaît à appeler les fruits des «hélicoptères», à cause du mouvement circulaire de la samare lorsqu’elle tombe à la fin de l’automne. Il semblerait qu’il soit comestible pour les humains, à condition d’être cuit, mais j’avoue n’avoir rencontré personne qui l’aille essayé. Soyez le premier ou la première à nous en faire part dans les commentaires, pourquoi pas ? Quant aux fleurs, elles ne sont qu’à peine remarquables. Ce sont des petites grappes vertes surtout visibles au début du printemps alors que les feuilles sont encore petites. Elles n’ont pas vraiment de valeur ornementale.

Étant un arbre indigène du Québec, il est une source considérable de nourriture pour la faune. Que ce soit ses feuilles, ses bourgeons ou ses fruits, plusieurs espèces s’en nourrissent, comme l’orignal, le lièvre, le lapin, le porc-épic, le chevreuil ainsi que différentes espèces d’oiseaux.

Conditions optimales

L’érable à sucre, dans les meilleures conditions, est un arbre robuste qui peut vivre jusqu’à 200 ans. Toutefois, les conditions urbaines ne lui sont pas favorables. En bordure de boulevard passant, avec tout ce que cela implique pour le sel de déglaçage et la pollution, l’érable à sucre n’y vivra pas longtemps.

Si on peut lui trouver un espace à l’abri des stress de la ville, il sera en revanche un arbre ornemental de choix. Il peut très bien être planté à un endroit où il y a un peu d’ombre, mais, idéalement, protégé du vent. Il faut prendre toutes les mesures pour que sa plantation soit un succès, comme de creuser un trou deux fois la grosseur de la motte, ajouter de la mycorhize, mettre de la matière organique, etc. Il s’agit d’un arbre difficile à transplanter. La matière organique aidera à garder un PH neutre, qui sera optimal pour cet arbre. Pour cela, vous pourriez simplement passer la tondeuse sur les feuilles d’automne puisque les feuilles d’érable à sucre broyées sont un excellent engrais naturel. Évitez les passages de machinerie lourde qui peuvent compacter le sol, et aux mieux, percez des trous dans le sol pour l’aérer et contrer le compactage. Pour son compagnonnage, on peut le mettre en présence d’autres feuillus ou conifères sans problème.

Élagage et entretien

Cette espèce d’arbre prend bien la taille en jeunesse, mais moins bien en vieillesse. Ainsi, pour que l’arbre pousse avec une bonne structure, on peut aisément faire de bonnes tailles de formations et ainsi prévenir les défauts. Par suite, une fois l’arbre arrivé à son stade adulte, on se limite au strict nécessaire. Déjà, si sa plantation a été bien réfléchie, on ne le retrouvera pas trop près des structures. En l’occurrence, il faudra se contenter de créer la distance nécessaire, sans ambitionner. Les élagages au gré des coups de tête, comme pour éclaircir l’arbre par exemple, devraient être évités si c’est possible. On prendra tout de même le soin d’éliminer les branches mortes, malades ou faibles, de même que les branches interférentes. Mais on doit être intentionnel pour le laisser tranquille, car il se remet mal de ses coupes.

Maladies

On note au passage des risques pour la brûlure des feuilles et une certaine sensibilité au phytopte. Il est aussi vulnérable à d’autres maladies, comme les caries et les chancres, et insectes, comme la perceuse de l’érable. Les spécimens qui semblent être attaqués doivent être diagnostiqués par des experts pour trouver les traitements nécessaires.

Bibliographie

  • Bertrand, Dumont. Guide des arbres, arbustes et conifères pour le Québec. Broquet, 2005.
  • Farrar, John Laird. Les arbres du Canada. Les Editions Fides, 1996.
  • Michael D. Williams. Guide D’identification des Arbres du Québec et de L’est de L’Amérique du Nord. Broquet, Incorporated, 2008.
  • Grabowski, Jan, et Jacques Rouillard, « Barbeau, C. M., Mythologie huronne et wyandotte, Pierre Beaucage, dir. (Montréal, Presses de l’Université de Montréal, 1994), 439 p. », Revue d’histoire de l’Amérique française 49, no 2 (1995), p. 259-260.
  • Innes, Louise et al., Principales maladies des arbres au Québec, Québec, Publications du Québec, 2006.
  • Pellerin, Gervais, et Hydro-Québec. Répertoire des Arbres et Arbustes Ornementaux: 1760 Espèces et Variétés de Végétaux du Québec.
  • Gouvernement du Quebec, publications vendues, 2010.
  • https://afsq.org/information-foret/nos-arbres/erable-a-sucre/#:~:text=Caract%C3%A9ristiques%20pour%20la%20faune,de%20Virginie%20et%20le%20li%C3%A8vre. (consulté le 22 mars 2023)
  • https://www.aflanaudiere.org/erable-a-sucre/#:~:text=SAVIEZ%2DVOUS%20QUE%20%3F,collation%20simple%2C%20sant%C3%A9%20et%20nutritive (consulté le 22 mars 2023).

 

 

 

 

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Dominic Perugino

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