Le travail au noir et l’arboriculture

26 Août 2021

Entreprises en arboriculture

Au moment de faire une estimation avec un entrepreneur, on vient souvent se poser la traditionnelle question : « si je te paye en argent comptant? ». Il arrive aussi que ce soit l’entrepreneur qui l’offre pour rendre sa soumission plus attirante. Espérant économiser ainsi quelques dollars, le client serre la main de son entrepreneur, scellant ainsi un contrat sans signatures ;c’est ce que l’on appelle pertinemment le travail « au noir ». Il est dans la noirceur parce qu’il est invisible aux organismes fiscaux et d’assurances tant publiques que privées. Avec les enjeux éthiques et les dangers de certains métiers, en particulier dans le domaine de l’arboriculture, le travail au noir est une très, très mauvaise idée. Voyons plus en profondeur les raisons de déclarer les travaux que l’on fait chez soi.

La redistribution

Permettez-moi un témoignage personnel en guise d’argument. Au centre de mes souvenirs de jeunesse se trouve le combat que j’ai dû mener contre l’asthme. Dans les années 80, cette maladie n’était pas encore très répandue, j’étais donc le seul élève de la classe qui devait traîner une curieuse petite pompe avec lui. Lors de crises d’asthme les pompes n’étaient pas suffisantes, il fallait donc aller à l’hôpital pour une hospitalisation de plusieurs jours avec des traitements plus agressifs. Les pompes étaient, pour une bonne partie, couvertes par l’assurance maladie. Les visites à l’hôpital étaient gratuites. Vous voyez où je veux en venir…
Une autre anecdote personnelle. Il y a quelques années, mon grand-père avait été diagnostiqué d’un cancer de la peau bien particulier qui pouvait se traiter avec un nouveau médicament. Celui-ci coûtait environ huit milles dollars par mois, mais cela ne nous a rien coûté, évidemment. Il ne faut pas oublier, pour lui aussi, les visites à l’hôpital, mais aussi les interventions à domicile des infirmières du CLSC pour le suivi de son état de santé et pour l’entretien quotidien de ses pansements. Pour faire le relais, une infirmière m’avait donné une formation gratuite pour que je puisse moi-même faire le pansement, et ainsi l’infirmière pouvait se libérer pour s’occuper d’autres visites à domicile de patients en attente.

Que celui qui a des yeux voit ce qui ne va pas avec le travail au noir ; c’est l’enjeu principal sur lequel nous voulons insister. Certes, vous n’avez peut-être jamais bénéficié de soins tels que ceux que nous avons mentionnés, mais ça pourrait vous arriver, à vous ou à l’un de vos proches. Et ceci n’est qu’un domaine, nous n’avons rien dit de l’école primaire et secondaire gratuites. Le but n’est pas d’entrer dans tous les détails. C’est seulement de dire, et d’insister sur ceci : les services dont nous bénéficions sont payés par les taxes. Si je choisis d’engager quelqu’un pour travailler au noir, ou si je choisis de moi-même faire des travaux sans les déclarer, c’est comme si je disais que je ne souhaite pas payer pour un autre enfant asthmatique ou pour une personne prise d’un cancer, mais que, moi, je mérite d’obtenir ces soins gratuitement.

Cet enjeu est donc le principal : notre intégrité à tout un chacun. Les petits slogans remontent parfois à la conscience pour se donner une pseudo justification : « le gouvernement nous vole chaque jour », par exemple. C’est là bien une parole dite par quelqu’un qui sait être en train de faire le mal ; c’est comme dire : « c’est lui qui a commencé ». On aura beau se donner toutes les défaites pour se dégager de nos responsabilités, il n’en demeure pas moins que ce sont les taxes qui payent pour nos services, si nous ne voulons pas les payer, nous sommes en train de dire que nous méritons d’en bénéficier sans payer.

Les dangers et les risques du métier d’élagueur

L’argument de l’intégrité personnelle devrait être suffisant pour que l’on s’arrête et que l’on se demande si notre conscience ne vaut pas plus cher que quelques dollars sauvés en taxes. Mais, il existe, pour le domaine de l’arboriculture, d’autres raisons bien sérieuses pour ne jamais faire de travaux sans les déclarer.

D’abord, une compagnie sérieuse d’élagage et d’abattage d’arbres détient généralement une assurance variant d’un à deux millions de dollars. Faire les travaux au noir signifie que vous n’avez aucune garantie que l’entreprise compensera les dommages qui pourraient avoir lieu sur votre propriété.

Par la suite, il y a l’absence de facture. Plusieurs éléments des travaux arboricoles feront l’objet d’une satisfaction ou possible insatisfaction de votre part. Que ce soit l’esthétique des travaux d’élagage, le dégagement et la protection des structures, le respect des règles de l’art, le ramassage des branches et du bois ou encore la propreté des lieux, vos travaux ne sont ni vus ni connus. La non-déclaration des travaux signifie donc aussi l’absence de garantie de suivi.

Le dernier point que nous voulons soulever est la sécurité pour les employés de chantier. L’arboriculture est un métier dangereux. Un entrepreneur qui fait des travaux non déclarés fait peut-être aussi travailler des employés sans les déclarer. Ce n’est pas pour rien que les entreprises arboricoles payent le plein prix envers la CNESST… Il faut le répéter, c’est un métier dans lequel même les meilleurs vétérans se blessent. Ainsi, pour tout accident qui aurait potentiellement lieu sur votre propriété, si les travaux sont faits au noir, les employés pourraient ne bénéficier d’aucune couverture.

Conclusion

En conclusion, il semble qu’il ne vaille pas même la peine de comparer les pours et les contres du travail au noir, l’intégrité n’ayant pas de prix. Mais il n’en demeure pas moins que même sur le plan purement pragmatique, le travail au noir arrive perdant. Le pour : on sauve un peu d’argent. Le contre : on prend toutes sortes de risques inutiles. L’entretien de la flore urbaine est une chose sérieuse, il ne faut pas la confier à n’importe qui. Il faut plutôt faire affaire avec une compagnie de conscience qui prend ses responsabilités et qui respecte les règles de l’art. Lorsqu’un entrepreneur vous offre de sauver les taxes ou accepte de faire les travaux au noir, cela ne vous donne-t-il pas l’impression qu’il a quelque chose à cacher ?